Exposition au Cabinet du Livre d’Artiste à Rennes 2 du 17 janvier au 19 mars 2019. L’exposition a été organisée par Lise Lerichomme.

« Mains gantées et pieds bottés. Représentations d’armées de femmes et corps collectifs féminins » : l’exposition a été organisée par Lise Lerichomme au Cabinet du livre d’artiste du 17 janvier au 19 mars 2019, qui a ensuite donné une conférence dans le cadre des Mardis de l’égalité à Rennes 2 le 19 mars 2019. L’iconographie utilisée provient de la Bibliothèque Marguerite Durand, du fonds d’éditions d’artistes du CNEAI et du Cabinet du livre d’artiste, ainsi que de prêts issus des collections personnelles des artistes de l’exposition. 

L’exposition « Mains gantées et pieds bottés » avait pour enjeu initial de rapprocher diverses représentations de corps collectifs féminins et d’armées de femmes. Le postulat de départ envisageait que la sérialisation des corps sexués – que celle-ci soit caricaturale ou émancipatrice – s’ancrait dans des imaginaires visuels et culturels, repris, transmis et appropriés par les artistes, militants·e·s et activistes. À la croisée d’une recherche artistique, curatoriale, et de la détermination d’un corpus de recherche en cours, cette proposition associait documents iconographiques, éditions d’artistes et œuvres contemporaines pour déterminer certains des traits saillants de ces représentations, depuis le milieu du XIXe siècle jusqu’à la période contemporaine.

Les escadrons de femmes s’assortissent généralement de caractères extérieurs manifestes, tels qu’uniformes, accessoires de vestiaires, gestes, postures et chorégraphies qui peuvent être retrouvés d’une représentation à l’autre. Pourtant, diverses stratégies ou tactiques sont employées par les illustrat·eur·rice·s, artistes ou militants·e·s, pour offrir des modèles de corps en troupe. Ce sont ces exemples variés qui furent présentés, repris et discutés pour partie lors de la conférence du mardi 19 mars et de la conversation avec l’artiste Agnès Geoffray qui y faisait suite.

L’un des enjeux notables était la tendance répétée de ces représentations à évoquer divers registres de fétichisation. Parfois, l’enjeu dépeint était la fascination exercée par le sex-appeal de la marchandise et son caractère fétiche, fascination tournée vers les accessoires que sont les gants et les bottes ; parfois, le sens des œuvres résidait dans l’évocation de l’attrait érotique exercé par ces mêmes accessoires.

Le croisement entre représentation de femmes au travail et mécanisation des gestes et des apparences était également notable. Ceci pouvait passer par une volonté de contrôle visant à rationnaliser les gestuelles, comme cela peut être l’enjeu dans le cas d’un travail à la chaîne. Mais cela passait aussi par une systématisation des représentations et l’exercice d’un canon visant à sérier les gestes, les corps et les visages, afin d’atteindre la fascination de l’ornement de la masse, comme cela peut être fait lors des parades et revues des girls, danseuses de cabaret. 

L’association générique des femmes en groupes avec des femmes aux mœurs dissolues ou faisant commerce de leur corps, permettait de souligner par effet de glissement une véritable physique du politique à l’œuvre dans ces représentations. De façon systématique, le corps devancerait les discours en ce qu’il dirigerait les esprits, les raisonnements et les enjeux des luttes. 

C’est contre cet imaginaire qu’artistes et militantes féministes cherchèrent parfois à atteindre une relative disparition/dissimulation des corps. L’invisibilisation ou le voilement  en tant qu’enjeu politique permet d’affirmer que le choix est fait, par les artistes, militant·e·s ou activistes de se défaire d’une apparence extérieure perçue comme féminine afin d’engendrer en retour une force d’action et de parole inédite.

« Mains gantées et pieds bottés » a fait l’objet d’un article d’Aurélie Cavanna dans Art Press, article illustré de quelques photographies de l’exposition. On pourra également consulter en ligne le numéro 48 du journal du Cabinet du livre d’artiste, Sans niveau ni mètre, qui accompagne l’exposition, avec une intervention inédite de l’artiste Agnès Geoffray.

Plus d’information : site Internet du Cabinet du livre d’artistes.