Link to the English version

Bien que les amateurs pratiquent le cinéma à domicile depuis l’arrivée sur le marché des caméras, les universitaires n’ont commencé à s’intéresser au sujet que dans les années 1990 (Odin 1995, Zimmermann 1995). La diversité de la pratique a été étudiée (Odin (dir.) 1999), son organisation sociale a été analysée, tout comme son économie (Creton 1999). Son utilisation comme source pour les historiens a été établie (Ollivier 2000), et le mot « amateur » en lui-même a également fait l’objet d’un examen critique (Stebbins 1992, Odin 1999, Bryan-Wilson et Piekut 2021). Cependant, comme les caméras accessibles aux amateurs étaient dépourvues de dispositifs d’enregistrement sonore jusqu’aux années 1970, on suppose généralement que leurs films étaient également muets. Liz Czach a notamment détaillé l’échec de la caméra sonore 16mm RCA-Victor commercialisée en 1935 (Czach 2018).

Toutefois, il a été démontré que les amateurs avaient une pratique de l’enregistrement sonore riche et variée (Masson 2022). La « chasse au son » était un passe-temps vivant souvent pratiqué afin de fournir des bandes sonores pour les films. Les images et les sons étaient enregistrés séparément et joués séparément lors des projections sur deux formats différents (film pour les images, cylindre, disque, bande magnétique, cassette pour le son). La proximité entre la chasse au son et le cinéma amateur était également présente au niveau organisationnel. Ainsi, les règlements de la Fédération Internationale des Chasseurs de Sons, fondée en 1956, s’inspirèrent de ceux de l’UNICA, Union Internationale du Cinéma Amateur, qui existait depuis 1931 (et existe encore aujourd’hui), et une personnalité comme Jean Borel, professeur de l’enseignement secondaire, fut en même temps un personnage central du développement de la chasse au son en Suisse, un des premiers secrétaires de l’UNICA, et l’un des fondateurs de la Cinémathèque de Lausanne.

Mais si des études existent sur le cinéma amateur (Zimmermann 1995, Shand 2008, Craven 2009, Turquety et Vignaux 2017) ainsi que sur l’enregistrement sonore d’amateur (Bijsterveld 2004, Masson 2020, Masson 2022) ; le son des films amateurs a jusqu’à présent été peu étudié (Wurlitzer 2012), et les liens entre cinéma amateur et enregistrement sonore d’amateur peu explorés.

Ce colloque abordera plusieurs thèmes pour concilier les approches techniques, culturelles et archivistiques :

  • le matériel : technique et pratique
  • le son du cinéma amateur : intérêt historique, esthétique, sociologique, anthropologique
  • les archives sonores du cinéma amateur : archivistique, patrimoine et restauration

Parmi les thématiques qui pourront être abordées :

Le son du cinéma amateur :

  • méthodes, outils et pratiques pour enregistrer le son
  • les disques, bandes et cassettes d’effets sonores : histoire et utilisation
  • histoire économique du cinéma sonore amateur
  • histoire du son direct

La synchronisation son et image :

  • quels procédés pour quels résultats ?
  • méthodes, outils et pratiques de la projection
  • en France, les systèmes et appareils Charles Vaast étaient couramment utilisés par les amateurs pour synchroniser le son et l’image, y en avaient-ils d’autres ? Et qu’en est-il à l’étranger ?

Lieux de pratique et de savoirs :

  • où et comment se faisait l’apprentissage du cinéma amateur, notamment de son versant sonore ?
  • quels liens entre ciné-clubs, clubs d’enregistrement, radio-clubs ?
  • les chasseurs de son français et suisses étaient régulièrement débauchés pour des contrats à la radio (Masson 2022). Qu’en est-il des cinéastes amateurs ? Existait-il des passerelles similaires avec la télévision et le cinéma ?

Les enregistreurs sonores du cinéma amateur :

  • disque à gravure directe, bande magnétique, cassette : histoire des procédés sonores, histoire des fabricants, histoire des supports
  • y a-t-il des sources documentant l’usage de phonographes à cylindre pour produire du cinéma amateur sonore ?
  • le 8mm magnétique, le 16mm magnétique et le 35mm magnétique : matériel, performance, utilisation, fabricants, histoire
  • les amateurs ont-ils été eux-mêmes sources de développements technologiques ?

La collecte de mémoire, de gestes et techniques, en son et en image :

  • à partir de quel moment le besoin se fait-il sentir d’ajouter de l’image au son ou du son à l’image pour capter des récits, fêtes, évènements privés et publics ? Ceux-ci apparaissent-ils différemment en fonction du médium qui les capte ?
  • L’absence de synchronisation son-image peut conduire à l’utilisation d’un commentaire illustrant, expliquant, les images. Existe-il des modalités particulières d’écriture de commentaires (par exemple influencées par le documentaire professionnel ou par d’éventuels conseils délivrées dans les revues et manuels de cinéma amateur ?) Quels rapports ces commentaires entretiennent-ils avec les images enregistrées ?
  • les amateurs comme collecteurs de l’histoire locale.

Les archives sonores du cinéma amateur :

  • quels corpus pour le son du cinéma amateur ? En France, les cinémathèques de région sauvegardent de riches collections sonores. Y a-t-il d’autres lieux de collecte et de sauvegarde ? Qu’en est-il à l’étranger ?
  • les archives sonores du cinéma amateur comme source pour la recherche en histoire, en sociologie, en anthropologie, en esthétique, pour la création artistique.

La restauration des archives sonores du cinéma amateur :

  • le bruit, son importance et ses significations contextuelles et média-référentielles.
  • l’influence des technologies et habitudes actuelles (définition et propreté de l’image, silence numérique, largeur du spectre sonore, etc.), sur l’appréhension des films du passé.
  • déontologie de la restauration.

Outre les communications scientifiques, ce colloque comprendra des tables rondes avec des cinéastes et preneurs de son amateurs, de démonstrations matérielles (projection, synchronisation, restauration), de projections de films sonores amateurs, de siestes sonores à partir d’archives sonores amateures.

Date limite de réception des propositions :

6 septembre 2024

Modalités de soumission :

Résumé de 250 mots accompagné d’une biographie de 100 mots envoyé à Jean-Baptiste Masson : jean-baptiste.masson@univ-rennes2.fr

Pour toute question :

  • Jean-Baptiste Masson (jean-baptiste.masson@univ-rennes2.fr), docteur en histoire de l’Université de York, post-doctorant Marie Skłodowska-Curie / Bienvenüe à l’Université Rennes-2, chercheur associé à la Cinémathèque de Bretagne.
  • Roxane Hamery (roxane.hamery@univ-rennes2.fr), professeure des universités, Université Rennes-2.

Comité scientifique :

Stéphanie Ange (Diazinteregio, Ofnibus), Anne Gourdet-Marès (Fondation Jérôme Seydoux-Pathé), Julie Guillaumot (Bibliothèque Nationale de France), Roxane Hamery (Université Rennes-2), Sébastien Layerle (Université Sorbonne Nouvelle), Alan Lozevis (Cinémathèque de Bretagne), Jean-Baptiste Masson (Université Rennes-2, Cinémathèque de Bretagne), Vanessa Nicolazic (docteure de l’Université Rennes-2, ATER, Université Grenoble-Alpes), Nicolas Noguès (Cinémathèque de Bretagne), Louis Pelletier (Université de Montréal), Giusy Pisano (ENS Louis-Lumière), Gaïd Pitrou (Cinémathèque de Bretagne), Mirco Santi (Home Movies), Vincent Sorrel (Université Grenoble-Alpes), Stéphane Tralongo (Université de Lausanne), Benoît Turquéty (Université Paris-8), Caroline Zéau (Université Paris Cité).

Bibliographie :

  • Bijsterveld, Karin. “’What should I do with my tape recorder?’: Sound Hunting and the Sounds of Everyday Dutch Life in the 1950s and 1960s,” Historical Journal of Film, Radio and Television 24, n°4, 613-34.
  • Bryan-Wilson, Julia, and Benjamin Piekut. “Amateurism.” Third Text 34, n°1 (January 2020): 1-21.
  • Craven, Ian. Movies on Home Ground. Explorations in Amateur Cinema. Newcastle-Upon-Tyne: Cambridge Scholars Publishing, 2009.
  • Creton, Laurent. “L’économie et les marches de l’amateur.” Communications 68, 1999, 143-67.
  • Czach, Liz, ‘The Sound of Amateur Film,’ Film History 30, n°3 (Fall 2018), 75-102.
  • Masson, Jean-Baptiste. “Sound Hunting: the Tape Recorder and the Sonic Practices of Sound Hobbyists in France and Britain, 1948-1978,” PhD thesis, University of York, 2022.
  • Odin, Roger (dir.). Le film de famille. Usage privé, usage publlic. Paris : Méridiens Klincksieck, 1995.
  • Odin, Roger (dir.). Communications 68, “Le cinéma en amateur,” 1999.
  • Ollivier, Gilles. “Mouvement en conserve, fabrique d’histoire(s). Les films amateurs : de nouvelles sources pour l’historien ?” ATALA 3, 2000, 33-48.
  • Shand, Ryan. “Theorizing Amateur Cinema: Limitations and Possibilities,” The Moving Image: The Journal of the Association of Moving Image Archivists 8, n°2, 2008, 36-60.
  • Stebbins, Robert A. Amateurs, Professionals, and Serious Leisure. Montreal, London: McGill-Queen’s University Press, 1992.
  • Turquety, Benoît, and Valérie Vignaux (eds.). L’amateur en cinéma. Un autre paradigme. Histoire, esthétique, marges et institutions. Paris: Association française de recherche sur l’histoire du cinéma, 2017.
  • Wurtzler Steve J. “Sound and Domestic Screens,” Cinema Journal 51, n°2, 2012, 153-7.
  • Zimmermann, Patricia R. Reels Families. A Social History of Amateur Film. Bloomington, IA: Indiana University Press, 1995.

Voir tous les articles