- Intervention de Hugo ORAIN – Panel 1 Révolutions 10h30 / 11h00 – Mythologies contemporaines : représenter la Révolution française dans We. The Revolution (Polyslash, 2019)
L’histoire a commencé à s’interroger sur son propre langage dès qu’elle s’est pensée comme science : se détachant de tout ce qui en elle faisait fiction, écartant le style et la plume de ses préoccupations principales, elle s’est ainsi structurée en tant que discours factuel sur le réel, tout en posant un regard critique sur sa propre écriture dans un retour sur elle-même somme toute très littéraire. En parallèle, loin de se cantonner à l’abstraction et à la rêverie, la fiction a pu développer de nouveaux champs d’exploration, libérés de toute contrainte de vérité mais en même temps capables, également, de raconter le réel.
Ainsi est battu en brèche l’un des vieux préjugés qui pèsent encore sur les cultures de l’imaginaire, quand bien même celui-ci s’use avec l’âge : elles constitueraient autant d’anti-histoires, voire de contre-histoires, selon l’idée qu’on se faisait de leurs mondes fictionnels clos, lointains, étrangers à tout. Elles opèrent au contraire ce pas de côté qui permet d’étudier les modalités au travers desquelles se raconte le réel. Ainsi se dessinent également les qualités qui font des cultures de l’imaginaire autant d’expériences inédites, même dans le champ médiatique. Autres planètes, autres mœurs : la supposée fracture entre le réel et l’imaginaire a permis à ces littératures d’explorer tout autant la « vérité scientifique » que son parfait opposé. Dans l’imaginaire, on se figure des branches inconnues du vivant, on inverse les lois de la physique et on travaille la science au corps ; mais on questionne aussi les revers de l’histoire, on invente des romans transnationaux, on ressuscite les morts et on manipule les motifs les plus traditionnels jusqu’à ce qu’ils s’extirpent de leur milieu de naissance pour produire des discours nouveaux. Ce sont ces ressources propres aux cultures de l’imaginaire que ce colloque se propose d’explorer, afin de considérer tout ce que la fiction elle-même dit de l’histoire, et tout ce qu’elle fait de l’histoire.